« Les Palestiniennes doivent rester solides »

« Les Palestiniennes doivent rester solides »


Regards sur Bethléem, no 73 - Entretien

Photo : © Caritas Baby Hospital

Education, libération et perspectives d’avenir : la Dre Iman Saca, vice-présidente de l’enseignement et de la recherche à l’Université de Bethléem, parle de la situation des femmes en Palestine dans un entretien avec Regards sur Bethléem. Elle se réjouit de la proportion élevée de femmes qualifiées aux postes de direction de l’hôpital pédiatrique.

Interview von Shireen Khamis

Comment la recherche influence-t-elle votre compréhension des défis auxquels font face

les Palestiniennes ?

En tant qu’archéologue et anthropologue, j’ai appris à voir les choses sous un autre angle. Par mon travail et ma réflexion, je m’immerge dans une culture afin de saisir la manière dont les gens perçoivent le monde et vivent leur vie. Cela me permet de mieux comprendre les sociétés et d’apprécier la diversité culturelle. J’ai passé une grande partie de ma vie en dehors de la Palestine, confrontée à un double défi pour réussir : être une femme et faire partie d’une minorité ethnique. Cela m’aide aujourd’hui à mieux comprendre les obstacles auxquels font face les femmes dans le contexte social et politique palestinien.

Comment la situation actuelle affecte-t-elle les chances des femmes ?

La situation politique et l’occupation touchent toute la population en Palestine, hommes, femmes ou enfants. Il y a une oppression systématique qui nous entrave à tous les niveaux, notamment sur le plan économique. Une solution à la situation politique implique donc également une solution à ma propre situation en tant que femme. La libération est un processus transversal qui demande de prendre en compte les questions économiques, sociales et culturelles. Nous devons faire entendre notre voix, nous engager socialement et agir juridiquement – pas seulement pour les femmes, mais pour toute la population palestinienne.

Quels sont les effets de l’éducation sur le rôle des femmes ?

L’éducation est le meilleur moyen pour les femmes de se libérer et de lutter pour leurs droits. Elle brise de nombreuses barrières. Elle permet aux femmes d’acquérir leur indépendance économique et de mener une vie de famille digne. Une femme éduquée est une femme forte qui fait face aux réalités de la vie et qui guide la prochaine génération vers un avenir meilleur. A l’Université de Bethléem, nous transmettons aux femmes connaissances et compétences afin qu’elles étudient et progressent sur un pied d’égalité avec les hommes. L’environnement bienveillant et sécure leur est favorable, surtout si elles sont issues de milieux défavorisés. Pendant leurs quatre années d’étude à l’université, je peux aider ces jeunes femmes à prendre leur vie en main en tant qu’individus à part entière.

Retrouvez-vous cette autonomisation (« empowerment ») à l’Hôpital de l’Enfance Bethléem ?

L’Hôpital de l’Enfance Bethléem se distingue par la forte proportion de femmes aux postes de direction. Elles dirigent cette institution de manière efficace à tous les niveaux. C’est une grande réussite, très appréciée. En tant que femme et présidente du comité consultatif de l’hôpital, j’en suis particulièrement fière. En général, les femmes influencent la culture organisationnelle de plusieurs façons – notamment par leur compassion et leur volonté de s’engager pour autrui. Elles sont aussi douées pour communiquer et coopérer. Tout cela les aide à comprendre les difficultés des mères et des familles qui cherchent de l’aide pendant le traitement hospitalier de leurs enfants.

Comment voyez-vous pour l’avenir ?

Les Palestiniennes doivent rester solides, puiser dans leur force intérieure et garder le cap, quels que soient les défis. Ces dix prochaines années, je pense que nous verrons davantage de femmes éduquées – et donc indépendantes. Je m’attends à les voir accéder en nombre à des postes de direction et s’employer activement à faire avancer le changement et la libération de la Palestine.

 

Partager